C'était enfin l'été. Sa saison favorite. Miss Holden n'avait jamais été grande fan de l'hiver, le fait de détester le froid n'aide pas. Bon, elle aurait pu déménagé dans un pays plus chaud, me direz-vous. Mais non, Arielle appartient à Londres et y restera toute sa vie. Rien ne l'empêche d'aller à Cuba chaque année. Depuis deux semaines, elle ne travaillait plus. Les vacances étaient bel et bien commencé. Ce qui était génial de travailler dans une école, c'est que les vacances sont plus longues. Et obligatoirement l'été. Après, bien sûr, il y a les vacances des fêtes et certains congés par-ci par-là. La période de fin d'année avait été très exigeante pour Arielle, elle était donc bien heureuse que tout soit terminé. L'été, elle se promettait de ne pas penser au travail. Bien sûr, en croisant certains élèves à la piscine ou bien au centre commercial, elle n'avait pas trop le choix d'y penser un peu. Arielle était dans la cuisine, se préparant un bon café avant de retourner au salon pour écouter un autre épisode de Friends. La journée était pluvieuse, elle avait donc envie de rester chez elle. Tomas travaillait, et sa fille Camryn était sortie, sans doute une pratique de danse ou bien elle passait l'après-midi avec des copains. Camryn, elle n'était plus un enfant. Sa petite princesse devenait tranquillement une adulte. L'après-midi passa, Arielle monta faire une petite sieste, chose qu'elle adorait faire quand il y avait de la pluie. Elle fut réveillée par un texto provenant de sa fille, lui disant d'aller la rejoindre au electric cinema. Arielle regarda l'heure, il ne lui restait que 5 minutes pour se préparer! Pas le temps de se maquiller, elle enfila des pantalons, un t-shirt rouge et s'assura d'attraper son parapluie avec son sac à main. En 10 minutes, elle était devant le cinéma, sa fille l'attendait à l'entrée. "Wahou, je me suis réveillée juste à temps. Tes plans avec tes amis sont tombés à l'eau?" C'était le cas de le dire, avec une température pareil. Arielle était contente de voir sa fille, qu'elle avait à peine croisé ce matin.

Voir sa petite princesse devenir une grande femme rendait Arielle très nostalgique. Elle grandissait à vue d'oeil. Et puis Arielle, de son côté, devenait vieille. Dans 4 ans, elle aurait la quarantaine. Elle se souvient encore quand elle a su qu'elle attendait une petite fille. C'était une nouvelle merveilleuse. Arielle aurait été aussi contente d'avoir un garçon, évidemment, mais avoir une petite fille, c'était magique. Sa petite poupée, comme quand elle était enfant et jouait au bébé. Les années ont passé si vite, surtout les 10 dernières années. L'adolescence l'a frappé en plein fouet. Autant un jour elle demandait encore des calins et des bisous à sa mère, elle lui disait tout et du jour au lendemain, c'était les claquements de porte, les "je veux être seule", ou les "laisse-moi tranquille". Oh, Arielle en a pleuré à chaudes larmes. Mais elle devait s'y attendre, cela avait été la même chose avec sa propre mère. On n'y peut rien. Ainsi va la vie. Ce qui la rassure, c'est que cette période de crise d'adolescence semble s'estomper depuis quelques temps. Déjà, que sa fille l'invite à la rejoindre au cinéma, c'était très nouveau. La brune était ravie. Camryn n'aurait pas fait ça il y a 2 mois. Oh non. Elle acceptait même d'être son plan B, s'il le fallait, ça ne la dérangeait pas. Au moins, elle passait du temps avec sa fille. La voyant approcher, Arielle était émue, oui, c'était le mot. Elle était fière de Camryn, qui devenait une femme. "Et bien je suis très contente que tu m'aie appelé! Ça fait des mois qu'on a pas fait une activité mère et fille ensemble!" Peut-être même des années, en fait. Arielle avait l'impression que Camryn passait plus de temps avec son père. C'était un feeling. La jeune Watson amena sa mère à l'intérieur. "Tu as une idée de film que tu voudrais voir? Par pitié, pas un film d'horreur." Elle n'avait pas envie d'être stressée tout au long de la projection.

L'été avait passé horriblement vite. Autant elle en avait profité, avec des après-midi à la plage, à faire la grâce matinée, à sortir en boîte avec des copines, malgré tout, Arielle avait l'impression que ça avait passé trop vite. Elle reprenait le travail dans quelques jours et elle était à un point à se demander si elle ne prendrait pas un congé. Elle adorait son travail, elle adorait les enfants, l'école, son directeur, ses collègues. Mais la fin d'année avait été tellement difficile pour elle mentalement et avait brûlé tellement d'énergie qu'elle avait peur de retourner au travail. Pourtant, elle devait se compter chanceuse d'avoir un 7 semaines de congé. Ce n'est pas tout le monde qui peut se le permettre. En fait, avec son travail, elle n'a pas vraiment le choix d'accepter, puisque l'école est fermée l'été. Et elle n'aurait jamais refusé un si long congé. Non, elle n'avait pas à se plaindre. Et pourtant, c'est ce qu'elle faisait. Même après tout un été à se reposer, Arielle sentait une énorme pression sur ses épaules. Le pire dans tout ça, c'est qu'elle gardait ses angoisses pour elle seule. Mais personne ne semblait le remarquer. Peut-être qu'au fond, elle était mieux de garder ça pour elle. Arielle n'aimait pas inquiéter ses proches et puis c'était peut-être mieux de passer à autre chose. Comme cette après-midi, avec sa grande fille. Qu'elle veuille passer la journée avec sa mère, une sortie mère-fille comme autrefois, quand Camryn était enfant. Arielle ne pouvait demander mieux! Après s'être donnée la bise, Arielle laissa sa fille choisir le film. Camryn mentionna le nom de Paloma, et Arielle faillit s'étouffer. Il y a deux jours, alors qu'elle sortait de chez Tomas, après un souper romantique, elle avait vu au loin Brody Sawyer, le mari de Camila, sa meilleure amie. Pensant que c'était le couple, elle s'était avancée pour aller les saluer. Sauf que l'homme n'embrassait pas Camila, mais bien Paloma. Arielle avait décidé de garder ça pour elle, mais elle comptait bien aller confronter Brody. Et même Paloma, par le fait-même. Bon, cela n'allait quand même pas gâcher sa sortie avec sa fille! "Eh bien, je ne connais pas ce film de mutants, mais l'affiche a l'air sympa!" Elles avançaient dans la file et Arielle sortit son porte feuille. "C'est moi qui paie, j'insiste!"

Arielle adorait passer du temps avec sa fille. Chose qui était rare ces dernières années. Camryn était adolescente et Arielle est bien placée pour comprendre que son ado a autre chose à faire qu'être collée toujours à sa maman. Elle a déjà eu son âge, elle sait ce que c'est. La belle époque où Camryn avait besoin de sa maman était terminée, Arielle avait fait le deuil depuis des années. L'époque où c'était Arielle qui choisissait ses vêtements, qui la coiffait, qui l'amenait manger de la crème glacée ou bien aller magasiner. Cette époque c'était du passé. Maintenant, elles se croisaient dans la maison, parfois elles mangeaient en même temps. Mais bien souvent, Arielle mangeait seule et lui laissait une assiette dans le frigo. Camryn étant soit au studio de danse ou bien avec des copines. Arielle n'était jamais inquiète, elle faisait confiance en son ado. Elle n'était pas le genre de maman poule (enfin, Arielle le pensait), elle voulait seulement que Camryn lui donne des nouvelles, si elle rentrait tard ou pas. C'était la même chose avec son père, elle en était sûr. Elle et le père de Camryn étaient séparés, mais ils se parlaient encore. Ils n'étaient pas meilleurs amis, mais pas des ennemis pour autant. Alors qu'elles attendaient en file, Arielle voulant payer, Camryn lui annonça qu'elle avait déjà tout payé à l'avance. Grâce à l'application téléphone. "Quoi? Je ne savais même pas qu'il y avait une application téléphone." Il faut dire qu'Arielle n'était pas née dans cette même génération. Cela ne la rajeunissait pas. "Bon, bon, vas-y, moque-toi de ta vieille mère..." Elles arrivent au stand de nourriture, Arielle dit : "J'ai envie de pop corn et du une tablette de chocolat-caramel! et toi?" Un mélange sucré-salé, c'était toujours la meilleure chose au cinéma.

Arielle n'allait pas souvent au cinéma. En tout cas, elle y allait plus avant. Maintenant, à l'âge adulte, et surtout depuis que Camryn était une grande fille, elle n'avait plus besoin de sa maman pour l'accompagner au cinéma. Il était arrivé à quelques reprises (peut-être 2 ou 3 fois), qu'Arielle était allé au cinéma avec Tomas. Surtout dans leur début de relation. Mais maintenant qu'ils sont ensemble depuis pratiquement 6 mois, la routine de vieux couple est bien installée. Et comme Tom a beaucoup de travail, surtout le soir et les fin de semaine, ils ne se voient pas beaucoup, donc peu d'occasion de sorties entre amoureux. Cela pourrait déranger Arielle, qui passe ses samedi soirs tranquille alors que lui travaille au bar. Elle pourrait aller le rejoindre, boire avec lui et ses collègues. Mais Arielle est un peu vieux jeu là-dessus. Elle ne boit plus autant, elle se couche tôt. Elle approche la quarantaine, donc. Elle préfère rester au lit devant la télé avec un bon thé et du chocolat. Arielle se sentait vieille, surtout quand sa fille parlait de technologie. Camryn tenta de la rassurer, lui expliquant qu'elles ne sont tout simplement pas dans la même génération. "Merci, ma fille, de ne pas me trouver trop vieille. Après tout, je dois être parmi les plus jeunes mères, dans ton cercle d'amis? Comme je t'ai eu à 18 ans... Et bonne idée, d'ailleurs tu pourras me montrer comment fonctionne snapchat? Ou je suis trop vieille pour avoir cette application?" Arielle était toute jeune quand Camryn est née. Elle était encore une enfant, quoi! Mais elle devait l'avouer, elle était contente de l'avoir eu jeune. Elle ne le regrettait pas du tout. Elles choisissaient leurs boissons et confiseries. Alors qu'elles allaient choisir leurs places, Arielle en profita pour poser une question à Camryn. "Alors, quoi de neuf, Cam? Tu passes beaucoup de temps au studio de danse, j'ai remarqué. Et je te trouve bien souriante, les yeux brillants ces derniers jours. Il se passe quelque chose?" Arielle était consciente que son adolescente n'allait peut-être pas tout lui raconter, mais si jamais elle avait envie, Arielle était très ouverte à l'écouter.